Depuis le début de l’année, nous avons eu le droit à de multiples reprises au spectacle du déploiement massif de la violence étatique contre les mouvements écologistes. Les médias libéraux ont fait très peu de cas de ces évènements bien qu’ils sont sans aucun doute d’une importance capitale. Je chercherai donc dans les lignes qui suivent à faire une présentation rapide de deux d’entre eux

Lützerath

Entre le 14 et le 16 janvier, le village de Lützerath en Allemagne fut occupé par des militant·e·s écologistes et anticapitalistes opposé·e·s à l’agrandissement d’une mine de lignite – un charbon considéré comme étant l’une des formes d’énergies fossiles les plus polluantes, il est par exemple deux fois plus destructeur que le gaz naturel – appartenant à la compagnie RWE. Cette extension fut autorisée par l’État allemand sous le prétexte qu’il n’était plus possible pour l’Allemagne d’importer de gaz russe du fait de la guerre en Ukraine, cependant des spécialistes ont démontré qu’une augmentation de la production de charbon n’était nullement nécessaire pour répondre aux besoins énergétiques de l’Allemagne dans ces conditions. Ainsi, des milliers de manifestant·e·s provenant de toute l’Europe se sont mobilisé·e·s pour lutter contre ce projet écocidaire, qui en plus de représenter une menace terrible sur le plan des émissions de gaz à effet de serre, menaçait de détruire avec le village de Lutzerath des champs propres à la culture

Certain·e·s allèrent se barricader dans le village avec les militant·e·s occupant celui-ci depuis déjà plusieurs mois, d’autres se groupèrent dans les champs autour de la place forte. Ils étaient au moins 35 000 au total. La compagnie, trouvant dans ces manifestant·e·s un obstacle à ses plans machiavéliques, fit alors appel à l’État qui déploya sa police pour aller faire régner les sacro-saintes lois de la propriété privée. Comble de l’indécence, ces forces furent transportées entre autres par des camions de l’entreprise. Inévitablement, des affrontements eurent lieu quand la police entreprit de disperser les manifestant·e·s. Ils firent des dizaines de blessé·e·s du côté manifestant et une vingtaine d’entre elleux durent être hospitalisé·e·s. En plus de la violence physique, les représentants de l’État usèrent de la stratégie bien connue du harcèlement judiciaire et entamèrent des poursuites contre près de 150 personnes.

N’est-ce pas la preuve que l’État priorise aujourd’hui les profits des grandes entreprises sur le bien-être des citoyens et sur l’avenir de l’humanité? Si vous n’en êtes pas encore convaincu·e·s, voilà qui suit un autre exemple, peut-être encore plus frappant, de cette même tendance.

Sainte-Soline

Le 25 mars, 6 000 militant·e·s écologistes et paysan·ne·s se regroupèrent à Sainte-Soline en France pour protester contre la construction d’une mégabassine, un bassin artificiel servant à stocker de l’eau puisée à même les nappes phréatiques à des fins d’irrigation des champs. L’organisation, "Les Soulèvements de la Terre", à l’origine de cette mobilisation s’oppose à la création de cette infrastructure, puisqu’elle celle-ci menace les réserves d’eau que représentent les nappes phréatiques en temps de sécheresse en plus de privatiser l’accès à l’eau. Ils s’opposent aussi globalement à l’agriculture industrielle qui voit dans les mégabassines un moyen de perpétuer leurs pratiques destructrices et gaspilleuses.

Les manifestant·e·s avaient donc pour but d’aller occuper la bassine en construction, iels étaient attendu·e·s par une horde de policiers lourdement armés. Ceux-ci bombardèrent littéralement les manifestant·e·s qui reçurent un total de près de 4000 bombes lacrymogènes et assourdissantes, sans parler de l’utilisation massive des fusils en balles à caoutchouc. Cet assaut fit 200 blessé·e·s du côté des manifestant·e·s, dont une quarantaine qui le fut grièvement et deux qui se retrouvèrent dans le coma. Ce carnage fut d’autant plus terrible que la police empêcha pendant plusieurs heures les ambulancier·ère·s de rejoindre le champ où avait lieu le massacre.

Cette violence étatique, sans aucune mesure, avait pour but d’étouffer la voix de paysan·ne·s menacé·e·s par la privatisation de l’accès à l’eau à l’heure des sécheresses et des changements climatiques.

Une même violence

En Allemagne comme en France on put voir s’incarner la violence des États, alors que ceux-ci se mettaient totalement au service des intérêts capitalistes contre ceux qui cherchent simplement à protéger les conditions d’habitabilité de la planète pour tous les humains. Cette violence n’est évidemment pas endémique à l’Europe. Comme vous le savez déjà, elle se manifeste de manière peut-être encore plus brutale de l’autre côté de l’Atlantique, au soi-disant Canada. En témoigne notamment l’usage néocolonial de la GRC sur le territoire des Wet’suwet’en pour forcer le passage du gazoduc Coastal Gazlink financé grassement par la banque RBC. Il nous faut donc prendre conscience de ce problème universel et construire des solidarités entre les différents mouvements décoloniaux, écologistes et anticapitalistes à travers le monde. Nous partageons toustes un même ennemi, le Capital défendu par l’État.