Les conséquences de l'implantation de Northvolt en Montérégie sont plurielles. En plus de la destruction des écosystèmes qu'entraînerait la construction de son usine, les décennies qui viennent verront aussi une multiplication des effets pervers de sa mise en activité, puisque la fabrication de batteries affectera la vallée du Richelieu tant sur le plan écologique que social. Regardons de plus près les multiples facettes du désastre de Northvolt Six.

​​Destruction de milieux naturels

Le projet d’usine de Northvolt entrainera la destruction d’un vaste terrain contenant des zones boisées, des milieux humides (plus d’une vingtaine) et des cours d’eau se déversant dans la rivière Richelieu. Les 40 hectares de milieux naturels abritent une riche biodiversité comprenant des dizaines d’espèces menacées ou en voie de disparition selon la Loi sur les espèces en péril, notamment une tortue molle à épines, un petit blongios, un pioui de l’Est et quatre petites chauves-souris brunes1. Le site comprend aussi des habitats d’es​​​​​​pèces de poissons potentiellement menacées, notamment le chevalier cuivré, une espèce protégée par les régimes provinciaux et fédéraux dont la seule population se situe toujours dans la rivière Richelieu2,3. En plus des impacts destructeurs en matière de biodiversité, l’implantation de l’usine aura aussi de nombreux impacts nocifs sur le plan écologique. La phase recyclage du projet rejettera plus de 50 000 tonnes de produits chimiques par année, ce qui dépasse le seuil provincial autorisé3.

BAPE et règlements contournés

Depuis les débuts du projet, l’État ne cesse de contourner ses propres normes, règlements et procédures pour laisser la voie libre au géant suédois afin que celui-ci soit en mesure de s’implanter au soi-disant Québec et de mener à terme son projet d’usine le plus rapidement possible et sans embuche. L’entreprise avait l’intention de déboiser la grande majorité du terrain alors qu’aucune autorisation à cet effet n’avait été obtenue du ministère de l’Environnement. Heureusement pour elle, les autorisations gouvernementales ont été délivrées à peine quelques semaines après l’annonce publique officielle du projet, alors que le délai d'obtention moyen est normalement de 15 mois. Alors que le PDG Paolo Cerruti jurait n'avoir bénéficié d'aucun traitement de faveur de la part des gouvernements, il a récemment été démontré que le gouvernement du Québec avait accompagné Northvolt à travers toutes les étapes du processus4. Pour suivre l'échéancier prévu par la compagnie, il leur faut déboiser l’entièreté du terrain avant la période de nidification qui a lieu au printemps. En effet, en vertu de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, Northvolt ne peut détruire l’habitat des oiseaux pendant cette période de nidification. C’est pourquoi le déboisement rapide est crucial pour leur permettre d’accélérer le début des travaux de construction.

Impacts sur les communautés avoisinantes

Outre les impacts écologiques qu’entrainera l’implantation de l’usine, les citoyen·ne·s de McMasterville et de Saint-Basile-Le-Grand ne tarderont pas à ressentir les répercussions sociales accompagnant un projet d’une telle ampleur. Une première conséquence évidente  est l’augmentation significative du trafic routier et autoroutier dans la région. En plus des centaines de travailleur·euse·s qui fréquenteront quotidiennement l’usine, il faudra aussi endurer le bruit et la pollution des camions et machineries qui viendront approvisionner et transporter le matériel nécessaire à la confection et au transport des fameuses batteries destinées à être exportées. Le ministère de l'économie a d'ailleurs déjà annoncé une subvention de 22,6 millions pour l'aménagement d'une voie d'accès temporaire passant par la route 116 pour la construction de l'usine5. La réfection de la route 223 et spécifiquement du tronçon passant par Saint-Basile-Le-Grand longeant la rivière Richelieu est aussi un projet à l’étude au ministère des Transports du Québec (MTQ).

Besoins en main-d’œuvre

L’arrivée d’une usine de cette ampleur engendrera aussi des besoins importants en travailleur.euse.s. Le ministre Fitzgibbon avait d’ailleurs lui-même déclaré, il y a un an, que le soi-disant Québec allait devoir faire venir « beaucoup d’étrangers temporaires » pour répondre aux besoins de main-d’œuvre générés par le développement de la filière batterie6. En effet, Northvolt compte faire venir des centaines de travailleur·euse·s spécialisé·e·s de l'étranger pour lancer sa production, comme l'a fait l'usine NextStar Energy en Ontario7. Alors que l’entreprise promettait de créer 2500 « bons emplois », celle-ci a finalement annoncé son intention d’avoir recours à plusieurs centaines de travailleur·euse·s via le programme gouvernemental des Travailleurs Étrangers Temporaires pour la construction de l'usine​​​​​​​8. Or, ce programme canadien est grandement critiqué pour les mauvaises conditions de travail qu'il impose à ses bénéficiaires. Même l’ONU le considère comme une forme d’esclavage moderne9. Les investissements publics dans les projets de construction d’usines de batteries participent donc à l’exploitation des personnes du Sud global et perpétuent ainsi une logique de développement économique colonial.

Finalement, l’arrivée de milliers de travailleur·euse·s pour répondre aux besoins de l’entreprise fera nécessairement pression sur la disponibilité des logements et sur la capacité des municipalités avoisinantes d’offrir les services essentiels à la population. Celles-ci devront rapidement s'assurer que les infrastructures nécessaires à leur accueil soient présentes (services sociaux et de santé, écoles, services d'urgence, fonctionnaires, routes, etc.). Or, Northvolt étant un nouveau joueur au sein du marché, rien ne garantit qu'il sera en mesure de faire sa place comme acteur de la filière batteries, ce qui rend ces investissements publics extrêmement risqués. C'est un cas de figure tristement récurrent, soit le récit tragique des villes minières qui se vident soudainement lors du départ ou de l'échec des projets d'exploitation. C’est toujours la même histoire qui se répète : lorsqu'il n'y a plus d'argent à faire, les compagnies s'en vont et les communautés restent prises avec des infrastructures devenues désuètes dans un environnement saccagé.

Les impacts de l’implantation de Northvolt seront donc néfastes pour les communautés locales, à la fois sur le plan écologique que social. Mobilisons-nous pour bloquer ce projet écocidaire et destructeur des communautés!

 

CULTURE DU CHAR

La culture du char est une idéologie fondée sur le dogme de la voiture. Elle désigne l’ensemble des structures urbaines, économiques et sociales qui renforcent notre dépendance à
l’auto-solo, empêchant donc le développement d’alternatives de transport
viables. La culture du char prend racine dans les systèmes de domination

capitaliste et colonial, puisque plusieurs industries extractivistes - pétrolières, gazières, minières, etc. - se perpétuent grâce à cette dépendance à l’automobile, qui induit inévitablement une production et une consommation globales croissantes de chars. Les États, complices de ces industries, les favorisent en finançant une panoplie d’infrastructures pour les voitures: routes et autoroutes, ponts, stationnements, usines d’assem- blage de voitures, projets miniers, pipelines, raffineries, ports pétroliers, etc.

 

Références

  1. Rodi, Frank. (2023, 31 octobre). La nature de Northvolt. Les Versants.
  2. Shields, Alexandre. (2023, 1er novembre). Northvolt prêt à raser les milieux naturels du terrain de sa future usine. Le Devoir.
  3. Shields, Alexandre (2023, 8 décembre). Pêches et Océans Canada a Northvolt à l'oeil. Le Devoir.
  4. Desrosiers, Sébastien. (2023, 10 novembre). Une phase de l’usine Northvolt sera soumise au BAPE. Radio-Canada.
  5. Gerbet, Thomas. (2024, 16 février). Des fonctionnaires ont aidé Northvolt à obtenir le feu vert de Québec. Radio-Canada.
  6. Halin, Francis. (2023, 22 novembre). Une subvention de 22,6 M$ de Québec à Saint-Basile-le-Grand pour les chemins de l’usine de Northvolt. Journal de Montréal.
  7. Prince, Véronique. (2023, 18 janvier). 10 000 travailleurs recherchés pour la filière québécoise de la batterie. Radio-Canada.
  8. Gerbet, Thomas. (2023, 24 novembre). Northvolt : des centaines d’employés étrangers pour lancer la production. Radio-Canada.
  9. Des travailleurs temporaires sud-coréens pour bâtir l’usine de batteries Stellantis. (2023, 20 novembre).|Radio-Canada.
  10. Mouton, Amélie. (2023, 6 septembre) Les travailleurs étrangers, un terreau propice à une forme contemporaine d’esclavage. Radio-Canada.